Leah Rabin, une femme de duplicité
(Yona Dureau)
- Suivant la coûtume et la polititesse
de cour entretenue dans les milieux politiques et médiatiques,
voilà que Leah rabin est encensée par la presse
pour le seul mérite d'être passée de vie
à trépas. Les portraits élogieux fleurissent
jusque dans la bouche des pires adversaires politiques de son
mari comme par exemple Shimon Peres, qui a toujours dû
céder la première place à Ytshak Rabin pendant
toute sa carrière politique. Ne le voilà-t-il pas
en train de chercher des compliments pour qualifier une veuve
qui n'a pas cessé de lui lancer des critiques acerbes..."C'était
une lionne" a-t-il déclaré "elle s'est
battu jusqu'au bout". Comme d'habitude, les paroles de Peres
sont significatives et terriblement à double sens, car
c'est là l'homme politique le plus gaffeur de toute l'arène
politique israëlienne, si sûr de lui qu'il ne se méfie
jamais de son inconscient. Leah était effectivement comme
une lionne, à la dent prête à mordre, mordant
souvent Peres, comme les hommes de droite.
Leah était une femme aussi ambivalent que le milieu politique
israëlien, toujours sur la défensive, une lionne
blessée depuis toujours.
En Israël, on connaissait l'alcoolisme de son mari, et les
bruits couraient comme des évidences culturelles: Ytshak,
disait-on, la battait. Qu'en était-il du bien fondé
de ces accusations? Difficile de répondre car la vie privé
des Rabin n'atteignait pas souvent l'objectif de la caméra.
Toujours est-il que Leah fut toujours l'image de l'ambition doublée
de l'ambivalence vis-à-vis de son époux.
Lorsqu'en 1974, Ytshak Rabin devient pour la première
fois premier ministre, on peut considérer qu'il a réussi
son ascencion, et qu'il peut enfin profiter de sa victoire. La
paye d'un premier ministre est plus qu'honorable, Leah n'a plus
de souci à se faire. Et voilà qu'il lui vient soudain
une envie irrepressible de contredire grossièrement la
loi, en ouvrant un compte en dollars à l'étranger.
C'est là la faute la plus grossière qu'on puisse
imaginer. Sous les feux des projecteurs, la femme du premier
ministre contrevient à une des lois mises en place par
son propre gouvernement ! Le résultat ne se fait pas attendre
: Rabin, doit se retirer de la vie politique trois ans après
sa réussite, et il devra rester hors du champ médiatique
jusqu'à ce que ce scandale soit oublié.
A la mort de son époux, Léah, d'après le
témoignage de sa fille Daliah-Philosoph (Haisha, 1999),
téléphone depuis la place des rois à sa
fille et lui déclare "Ne t'inquiéte pas, papa
va bien, ils m'ont dit qu'il n'a rien et que c'est tout du bluff,
ne crois pas ce que dit la télé, je t'expliquerai..."
Léah est emmenée par les services de sécurité
au siège du shin bet pendant plus de 45 minutes. Personne
ne s'étonne qu'elle n'ait pas été amenée
directement à l'hôpital Irlosorov où son
mari est en train d'être soigné. Elle-même
ne s'en est pas plainte. Dès l'annonce de la mort d'Ytshak
Rabin, et alors que sa famille s'effondre devant le drame, elle
tourne sa verve contre Bibi Natanayahou en l'accusant d'être
à l'origine des affiches haineuses représentant
Rabin avec un kefieh, ou alternativement, avec un casque nazi.
Elle persistera dans son discours accusateur pendant des années,
alors que l'origine des affiches aura été démontrée
depuis longtemps : elles ont été faites par Avishai
Raviv, agent du shin Beth au service du bureau du premier ministre...
La veuve éplorée assiste dès le lendemain
à un concert donné à Paris en l'honneur
de son défunt mari. Elle est maquillée, magnifiquement
vêtue, la tête découverte : pour les Israëliens,
celle qui s'est voilée pour rencontrer le pape et qui
portait alors un chapeau s'avère incapable de respecter
ne fut-ce que par une seule marque le souvenir de son mari, par
un petit signe de deuil. Pour les Israëliens, elle a, ce
soir-là, craché sur sa tombe...
Leah Rabin hérite, à la mort de son époux,
d'un bureau, d'une secrétaire, d'une voiture de fonction,
et d'un salaire de premier ministre. Le côté anomalique,
c'est que rien, aucun vote, aucun discours de la knesset, n'est
venu ponctuer ces rentes financières viagères,
et que même si la chose peut sembler une marque de respect
vis-à-vis de son époux, aucune loi n'ayant prévu
ces circonstances, un vote aurait dû établir cette
décision. L'opposition, par décence, ne dit rien...
Mais Leah ne s'arrête pas là. Elle cherche tout
d'abord à pousser son fils dans la vie politique, en profitant
de l'aura de marthyr d'Ytshak. Yoav n'a pas le charisme de son
père, et la tentative échoue, après plusieurs
maladresses politiques du fils...
La lionne pour qui le pouvoir n'a raison que lorsqu'il est dans
ses mains, continue ses attaques. Natanyahou et la droite continuent
de sublir ses accusations infondées, délirantes,
mais sans pouvoir réagir, car un pacte lie la droite à
la gauche sur l'affaire Rabin: la gauche n'utilise pas l'assassinat
comme thème électoral, et la droite ne révèle
pas ce qu'elle sait des dessous de l'affaire. La lionne frappe
aussi de plus en plus la gauche. Il y a quatre semaines, elle
déclare à la presse que Ehud Barak fait fausse
route, et que Ytshak doit se retourner dans sa tombe, qu'il ne
fallait pas tant faire de concessions...
Lorsqu'elle est brutalement hospitalisée, il y a deux
semaines, la presse se tait et ne commente pas. Il aura fallu
seulement deux semaines à Leah pour s'effondrer... Nul
doute que son départ en libère plus d'un...